Très influencée par les cultures de l'ouest africain, Martine Prud'hom affirme que l'exactitude des techniques de capture d'images ne restitue pas tout. Les forces internes, l'énergie émise, la vibration de chaque parcelle de vie s'exprime.
La science nous apprend que l'univers organisé et régit par des lois physiques universelles n'est que le reflet d'une multitude d'infimes particules en apparent chaos, mais ordonnées par les lois quantiques, ou la matière n'est qu'énergie et ondes.
Aujourd'hui, les biologistes ne parlent plus de biodiversité mais plutôt de chimiodiversité tant des échanges moléculaires colossaux entre animaux et plantes leurs sont apparus comme une évidence.
L'apparence, l'enveloppe dans lesquelles notre univers hypermédiatisé nous décrit le monde et nous en transmet les nouvelles ne sont pas suffisantes. Cette vision du réel est imparfaite et n'est pas immanente.
M art'IN s'efforce d'échapper à cette contingence et veut privililégier la perception des sensations, ou l'émotion transpire, se transmettant à une échelle infime, « moléculaire ».
« L'émotion, les sensations étaient à l'origine et au cœur de ce qui nous faisait humain », disait Darwin.
« Tout est lié. Tout est vivant. Tout est interdépendant », nous dit Amadou Hampâté Bâ. Les images que l'on voit ne sont pas toujours représentatives de ce qu'elles sont sensées représenter : « si la branche veut fleurir, qu'elle honore ses racines. »
Si l'on désire pénétrer l'acte intime de la création de M art'IN, il faut faire appel à la phénoménologie d'Hegel, particulièrement à la théorie de la perception de Merleau Ponty et de Michel Henrie, qui nous ont questionné sur les sensations intérieures subjectives, perçues par tous.
Les sentiments, les émotions, nous font osciller entre souffrance et joie. Ce « ressentir » ne peut pas être constaté, mesuré dans une logique quantitative cartésienne mais cependant il érige nos vies, notre volonté, nos choix et donc nos décisions.
L'affectivité est essentielle au devenir de l'homme et son interactivité avec le monde vivant et les éléments qui l'entourent doit être pleine et aiguisée.
L'enfant comprend dans le regard, le sourire et le langage de sa mère avant même de comprendre les mots qu'elle prononce.
Dès 1929, après avoir étudié les livres chinois Le Mystère de la Fleur d'or et le Yi King, Jung constate que la doctrine du non-agir taoïste est similaire à sa méthode moderne de l'imagination active.
Marie-Louise von Franz en étudie l'usage au sein des textes alchimiques et voit l'activité alchimique et pratique comme une tentative d'intégrer, pour l'adepte, des contenus inconscients. Elle cite également les techniques de méditation orientales, du bouddhisme zen ou du Yoga tantrique, dans lesquelles la visualisation des émotions tient une place importante dans le développement de soi.
Jung a écrit plusieurs essais dans lesquels il s'attache à décrire les processus inconscients à l'œuvre dans la création artistique et littéraire. Dans « Psychologie et poésie », il explique qu'« étudier une œuvre d'art, c'est analyser le fruit, engendré intentionnellement, de facultés et d'activités psychiques complexes ».
Le produit de l'imagination artistique n'est néanmoins pas uniquement révélateur de la psychologie de l'artiste, mais témoigne, par sa connexion à l'inconscient collectif, de la psychologie d'une époque.
Enfin, les surréalistes utilisent l'imagination active pour mettre au jour la créativité de l'inconscient, mais dans une perspective non thérapeutique.
"Nous sommes de cette étoffe sur laquelle naissent les rêves, et nos rêves naissent longtemps avant que nous sachions de quoi cette étoffe est faite", dit Shakespeare.
Il n'y a pas, nous disent les neurosciences, d'attention, d'intention, de choix de mémoire sans émotion. Elles sont le socle sur lequel nous nous construisons. »
M art'IN veut témoigner de ces concepts pour la compréhension de notre univers et s’engage dans leur restitution artistique. Le problème, c'est l'orientation figée de notre perception, l'appréhension bâclée de nos intuitions. Il faut imposer par le visuel l'approche furtive d'une perception intime, spontanée et prégnante, au sein de celle, triviale, conceptuelle et formatée par les filtres culturels et sociaux.
Cette perception subjective est indispensable à l'expression et au bien être de l'homme. Elle est reflet d'un esthétisme personnel, modelant parfois impérieusement la pensée et notre rapport au monde.
La toile se présente avec un thème central,
mais c'est toujours dans les détails que les occurrences isolées et les allégories connexes donneront à l'oeuvre son caractère achevé.